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Quelles références et quels objectifs dans l'enseignement de la mondialisation ?

 


 
 
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Quelles références et quels objectifs dans l'enseignement de la mondialisation ?


Dans le cadre d’une recherche en cours sur l'enseignement de la mondialisation, nous étudions les "vivacités" de cette question dans les références utilisées et comment ces références sont mobilisées dans l’enseignement. Nous partons du concept de transposition didactique, c’est-à-dire de d’analyse de  la « transposition » d’un savoir de référence, - le savoir universitaire à l’origine -, en savoir à enseigner puis au savoir enseigné. De plus, lorsque nous évoquons la mondialisation comme question vive, nous prenons en compte les controverses et débats suscités par ce thème tant au niveau théorique qu’au niveau social ainsi que leurs conséquences en terme d’enseignement. C’est donc une approche épistémologique qu’il faut croiser avec l’analyse de l’enseignement. L’étude des représentations-connaissances des élèves sur la mondialisation, des discours des enseignants sur leurs pratiques et l'observation de séquence d'enseignement constituent d’autres volets de la recherche. Nous limiterons ici notre propos à une interrogation sur la question des références qui débouchera sur la question des objectifs d'enseignements qui concernent le thème de la mondialisation.


La mondialisation, un vocable polysémique et équivoque

Les divergences sur la mondialisation portent  tout d’abord sur la définition du terme lui-même ; il est donc nécessaire d’en faire une analyse sémantique. Alors que le terme « international » existe depuis la fin du XVIIIème siècle avec l’émergence des Etats-Nations, l’apparition du mot « mondialisation » a lieu au début des années 60, alors que le monde anglo-saxon invente pour sa part, quelques années auparavant, le terme « globalization ».  Ces deux termes apparaissent dans la presse écrite pour décrire des phénomènes régionaux ou nationaux qui se retrouvent au niveau mondial. A la fin des années soixante apparaît la notion anglo-saxonne de « global  village » pour évoquer l’idée d’une communication rapide et commune à l’ensemble du monde, en s’inspirant des travaux de Mc Luhan (Vedel 2001, Dagorn 1999).

Cette approche s’appuie notamment sur les avancées techniques (télévision, satellite) et sont illustrée par le traitement de l’information autour de la guerre du Vietnam. Il faut attendre près de 20 ans pour que la recherche s’empare de la notion de mondialisation au travers de deux phénomènes : les entreprises multinationales et les marchés financiers. La discipline économique a été la première à développer et à utiliser la notion, notamment au travers d’un article de Théodore Levitt souvent considéré comme emblématique (Levitt, 1983) ; c’est sans doute là une des explications de l’association fréquente entre mondialisation et économie. Le concept de Triade, fortement réutilisé par les géographes, apparaît en 1985 sous la plume d’un économiste japonais (Kenichi Ohmae) ; le concept est aujourd’hui enseigné au sein de la discipline géographique. Les termes « intégration » (Stiglitz, 2000) ou « interdépendance » qualifient cette dimension économique. La dimension économique demeure longtemps prééminente dans la notion de mondialisation, même si le terme va être investi progressivement par la sociologie, la géographie et les sciences politiques.

Cependant, la terminologie n’est pas fixée pour autant et le terme de mondialisation reste polysémique, à telle enseigne qu’il paraît difficile de retenir une définition sur laquelle tout le monde s’accorderait et qui soit suffisamment porteuse de sens. Il est intéressant de relever les nuances apportées par des termes proches :


> l’internationalisation
qui fait référence aux nations et donc aux liens entre pays notamment aux liens commerciaux ;
> la globalisation
qui ferait plutôt référence à la dimension financière lorsque le terme est évoqué en économie et à la notion d’unité, de « global village » pour une dimension culturelle ou technologique ;
> le mondialisme
qui a une dimension idéologique (Passet 2001) car le terme est porteur de convictions et de système de valeurs ;
> l’alter-mondialisation
qui renvoie à des pratiques sociales et à l’idéologie au travers des mouvements de contestation (Seattle, Gènes, ATTAC…).

Pour aller plus loin dans l’approche épistémologique de la mondialisation et en déterminer les contours, nous proposons d’aborder la notion de mondialisation en tant que concept, ensuite en tant qu’idéologie et enfin en tant que pratiques sociales. Les différentes catégorisations utilisées n’ont pas prétention d’être exhaustives ni exclusives : les concepts de système, de pays, de culture … peuvent appartenir à plusieurs disciplines ; il s’agit plutôt de faire état de la majorité des approches conceptuelles, des idéologies et des pratiques sociales.


Le concept de mondialisation

Nous postulons que « la mondialisation » est un quasi-concept ; il a donc vocation à constituer une interprétation théorique d’une réalité, une construction de la représentation d’une réalité complexe. Apparu dans les médias, intégré aux sciences économiques, le concept s’est étendu rapidement aux autres sciences sociales (géographie, sociologie, politique, histoire …) pour devenir aujourd’hui une question transdisciplinaire. Il est important également de définir les articulations (filiation, complément, substitution, justification …) avec d’autres concepts, relevant de différentes disciplines, car si toutes utilisent le terme, les problématiques auxquelles il fait référence sont différentes. L’analyse de la mondialisation n’est pas indépendante, évidemment, du cadre d’analyse utilisé ; il est alors intéressant de comparer comment la mondialisation est mise en perspective au travers de différentes approches, le découpage pouvant paraître souvent arbitraire sur cette question.


Analyse transdisciplinaire

Le concept de mondialisation peut être abordé sans qu’il soit rattaché à une discipline particulière pour le définir ; parmi ces approches transdisciplinaires, certaines (parmi les plus diffusées auprès des enseignants) semblent retenir aujourd’hui l’attention. Michel Beaud (1999) soutient la thèse que la mondialisation que nous vivons depuis les années quatre-vingt dix  est un phénomène plus large que la simple globalisation économico-financière et socioculturelle ; elle est une rupture des modes de fonctionnement,  un basculement qui nécessite un nouveau mode de régulation (gouvernance). La mondialisation est alors considérée comme un nouveau phénomène qui associe des ruptures et innovations technologiques et sociales aux interactions économiques.

Pour Robert Boyer (2000), la mondialisation n’est pas une rupture majeure, il y a surestimation de l’internationalisation dans la globalisation car on peut observer une stabilisation du degré d’ouverture des économies depuis 1973, la situation était identique au début du XXème siècle et le poids des États demeure important malgré le développement des multinationales. Pour Denis Clerc (2004), la mondialisation passe par des périodes de spécialisation (1860-1913), de multinationalisation (1950-1980) et par l’intégration (depuis 1980). La mondialisation ne concerne pas l’ensemble de la planète car elle est circonscrite au Nord et à quelques pays du Sud ; l’internationalisation des échanges ne touche pas de manière identique tous les pays. Si on observe une croissance des échanges pour la Chine, les échanges de l’Afrique sub-saharienne régressent.

Pour Serge Latouche (2000), la mondialisation n’est que le dernier avatar d’un processus multiséculaire d’occidentalisation du monde qui le conduit à sa perte. Cette analyse radicale conduit à refuser en bloc tous les discours et toutes les pratiques qui se réclament d’une logique du développement. La notion de système va être mobilisée par de nombreux auteurs qui vont utiliser ou emprunter des termes proches : la totalité (Beaud), l’archipel mégalopolitain mondial (Dollfus, 1998), le macro-système technique (Alain Gras, in Dollfus)… Les anglo-saxons font référence au terme Global Change. Le système-monde de Braudel (1979) et Wallestein (2002) reste une référence incontournable pour l’ensemble des historiens et géographes, mais aussi des économistes qui utiliseront les notions de centre et de périphéries (depuis F. Perroux). Sans doute, pourrions-nous ajouter de nombreux auteurs, mais il nous semble intéressant de retenir ici que la mondialisation fait référence, dans ce cadre transdisciplinaire, aux concepts d’intégration, d’interaction, de régulation, d’interdépendances...


L’approche économique de la mondialisation

En économie, différents cadres d’analyse – relevant eux-mêmes de différents courants - peuvent être mobilisés ; il s’agit en fait des cadres d’analyse mobilisés dans l’analyse des échanges internationaux. Citons principalement :


> la théorie standard
des avantages comparatifs (ou parfois appelé théorie de Ricardo) et sa prolongation  avec le théorème dit HOS (Hecksher, 1919 ; Ohlin, 1933 ; et Samuelson, 1949) ;
>la « nouvelle théorie du commerce international »
qui intègre les notions de concurrence imparfaite, d’externalités, de pôles de développement pour expliquer l’évolution des échanges notamment au travers des multinationales ;
> l’économie du développement
qui va utiliser les notions d’échange inégal, de terme de l’échange, d’effets monétaires ou encore de division internationale du travail.

On pourrait ajouter – ou relier - à ces problématiques, les questions de géographie économique qui vont chercher à qualifier les liens entre l’activité économique et l’articulation de territoires (Pierre Veltz, 2002) Ces différentes approches peuvent être complémentaires mais aussi conduire à des conclusions contradictoires. Il n’est donc pas possible de simplifier les controverse entre les économistes en disant que le cadre théorique à dominante néo-classique, - qualifié de "main stream" -, justifie une pensée libérale alors que l’économie du développement conduit automatiquement au protectionnisme. Les controverses portent donc à la fois sur le domaine de validité des cadres d’analyse utilisés et sur la généralisation des conclusions.


Analyse géographique et historique

Le terme de mondialisation fait alors souvent référence au développement des réseaux, rappelant le « global  village» avec une culture commune par l’augmentation de circulation de l’information (télévision, Internet …) et des individus. Dans les années quatre-vingt de nombreux géographes s’emparent de la notion de mondialisation ; ils vont notamment réinvestir la notion de système-monde de Fernand Braudel et Immanuel Wallerstein. En s’appuyant sur Fernand Braudel, Jacques Le Goff évoque d’autres mondialisations : Carthage, Rome, l’Islam, la Chine … Pour Le Goff, ce n’est qu’une forme nouvelle de mondialisation qui commence au XVIème siècle, forme particulière qui émerge avec le capitalisme et le primat de l’économie (Le Goff, 2001). Au travers de cette dernière approche, l’hypothèse d’une rupture soutenue par Michel Beaud est mise à mal car il ne s’agirait, aujourd'hui, que la poursuite d’une forme particulière d’un système-monde. Olivier Dollfus, dans un cadre systémique, introduit les problématiques de l’articulation des réseaux et territoires, de circulation de l’information – les distances spatiales et sociales étant modifiées – de concentration des pouvoirs et populations.


Approche sociologique

L’analyse sociologique de la mondialisation va s’articuler souvent autour des concepts d’identité, d’acculturation et d’information. La dimension culturelle est un élément prépondérant dans l’analyse de la mondialisation. Pour Dominique Wolton (1998), la mondialisation doit être abordée sous un angle multiculturel ; les échanges dans le « global  village» ne conduisent pas à une uniformisation culturelle mais doivent s’appuyer sur la reconnaissance d’un multiculturalisme afin d’éviter les replis et le développement du communautarisme.


Des concepts politiques

L’analyse politique va s’interroger sur la "gouvernance" au travers des rôles et pouvoirs dévolus aux Etats-Nations face au poids grandissant des multinationales et de la nécessité d’éventuelles entités supra-nationales régionales (ALENA, UE, Mercosur…) ou mondiales (OMC, ONU, FMI…). De nouvelles modalités de régulation doivent-elles être mises en place au nom de principes inhérents à la démocratie ou à la citoyenneté ? Les mesures prises vont justifier des mesures de protectionnisme ou au contraire de libéralisation des échanges entre pays. Ajoutons que la frontière du domaine politique avec les problématiques économiques, géographiques ou sociologiques est très ténue ; certains auteurs la franchissent pour argumenter des prises de position politique parfois très radicale (Dominique Wolton, Serge Latouche, Michel Beaud, Jacques Berthelot…).


Les idéologies de la mondialisation

Derrière le terme "idéologie", nous faisons référence à une épreuve de jugement de valeurs sur la base de convictions et de principes, opposée parfois au jugement de faits que serait la « science », alors définie comme objective. Or, la réalité – la mondialisation pour ce qui nous intéresse – peut être abordée de manière scientifique ou au travers des systèmes de valeurs des individus. Cette séparation entre idéologie et science n’a pas toujours existé, les sciences dites humaines ont longtemps été définies comme des sciences morales et cette séparation est remise en cause dans certaines analyses qui intègrent les liens entre sciences, techniques et société. La place des valeurs dans l’approche d’une question est d’autant plus importante qu’il s’agit d’une question vive, c’est-à-dire une question qui donne lieu à débat à la fois dans le domaine scientifique et dans la société. Les engagements, - ou au minimum des recommandations de mesures politiques ou les références philosophiques -, de divers scientifiques auxquels nous avons déjà fait référence (Jacques Berthelot, Michel Beaud, René Passet, Serge Latouche, Dominique Wolton…) sont pour nous l’illustration de liens entre approche scientifique et système de valeurs. Se poser la question des systèmes de valeurs est d’autant plus important lorsqu’il s’agit d’enseignement puisque l’école est aussi le lieu de transmission de valeurs.

Sur la question de la mondialisation, nous pouvons identifier deux systèmes de valeurs de référence : le néo-libéralisme et le mondialisme. Le "néo-libéralisme" est considéré comme le synonyme d’une mondialisation marchande. Ce système de valeurs justifie une marchandisation des échanges, une standardisation des produits tout en utilisant éventuellement les différences ; le marché est posé comme étant le mode de régulation des échanges le plus efficace. Les références à la primauté de l’individu (ou de l’homo œconomicus, son modèle abstrait) sur le collectif sont indissociables des valeurs néo-libérales. Par opposition, le "mondialisme" se réfère à un humanisme, la reconnaissance du collectif se complétant par la reconnaissance des individualités. Ce système de valeurs se veut un équilibre entre universalisme - égalité de tous les individus - et respect des différences. La référence à la citoyenneté, voire au citoyen du monde (comme modèle idéal), s’inscrit dans ce courant qui peut être considéré comme proche de l’alter-mondialisation.


Les pratiques sociales autour de la mondialisation

Certaines pratiques sociales, collectives et/ou individuelles, nous paraissent avoir un fort lien avec les approches de la mondialisation. Il s’agit :


> des pratiques d’entreprises :
délocalisation, globalisation financière, multi-nationalisation … qui font plutôt référence à une idéologie néo-libérale, alors que le commerce équitable va plutôt s’appuyer sur le mondialisme ;
> des pratiques de consommation
marchande au travers de biens fortement standardisés et uniformisés (Coca-Cola, Nike, …) ou au contraire de produits différenciés, de circuit court ou du commerce équitable ;
> des pratiques politiques :
dominantes : déréglementation, ouverture des frontières et des marchés, mode de gouvernance mondiale (OMC,…), néo-impérialisme ... ;
> autres : les pratiques contestataires ou alternatives représentées par les manifestations des alter-mondialistes (Gènes, Porto Alegre, …), par les activités d'associations comme ATTAC ou les actions des ONG, mais aussi avec des pratiques communautaristes de repli

> des pratiques culturelles,
notamment des médias télévisés et d’Internet et également des loisirs, qui participent soit à une uniformisation au sein du « village global » (Disney, Internet, la langue anglaise…) soit à l’exception culturelle au travers de pratiques qui s’appuient sur une différenciation culturelle.


Une dialectique commune à ces différentes approches

Les différents processus dont la résultante constitue le processus global de mondialisation se développent selon une dialectique avec dominante. C'est ainsi que le processus économique et culturel de standardisation constitue l'aspect dominant d'un processus global au sein duquel lui est associé un processus dominé de différentiation, parfois centré sur le local (d'où le néologisme de "glocalisation"). Pour reprendre des exemples dans les pratiques de consommation marchande, le firme Coca-Cola développe une gamme très large de produits différenciés selon les pays pour s'y implanter en s'adaptant, mais en s'appuyant sur ces produits segmentés pour mieux diffuser le produit phare standardisé, symbole du rêve américain, qui remplace ensuite le plus souvent les produits différenciés. Mac Donald impose des produits standardisés partout dans le monde, mais désormais en "localisant" les matières premières. De même, les grands réseaux de la distribution ont compris que leur intérêt est de laisser une place marginale à des produits du commerce équitable, pour mieux retenir les consommateurs et vendre massivement des produits standardisés.


Les champs de la mondialisation

L’analyse de la mondialisation, basée sur les différentes théories et idéologies et concernant diverses pratiques sociales, s’applique prioritairement à certains champs ou domaines où les enjeux sont particulièrement importants. Ces champs où les gains et pertes paraissent stratégiques sont actuellement (et sans prétendre à l'exhaustivité) :


> l’alimentation dans le monde
qui pose des questions relevant de la survie humaine au travers des questions relatives à l’agriculture, à la santé et à la sécurité alimentaire, à l’auto-approvisionnement ;
> la pauvreté dans le monde
, qui malgré la croissance économique perdure sur le globe ;
> l’environnement
dont la dégradation (réchauffement climatique, pollution…) ne peut être abordée sans prendre en compte les interactions au niveau mondial ;
> la culture
dont la résultante de son évolution peut se traduire par les enjeux de paix ou de guerre si le multiculturalisme n’est pas respecté,
> le tourisme
qui allie des questionnement culturels et économiques avec une forte interaction entre local et global.


L’enseignement de la mondialisation à l’École et ses objectifs

Le thème de « la mondialisation » fait l’objet d’enseignements scolaires, explicitement ou implicitement et à tous les niveaux du cursus scolaire. La recherche en cours, menée par une équipe pluridisciplinaire (UMR « ADEF » -Université de Provence, INRP, IUFM d’Aix-Marseille- et ENFA-Toulouse) étudie donc comment des savoirs sur la question de la mondialisation, produits ailleurs que dans l’Ecole, prennent « forme scolaire ». Elle associe des chercheurs universitaires et des professeurs des Ecoles, des Collèges et des Lycées (d’Histoire-Géographie, de Sciences Economiques et Sociales, de Sciences et Technologies Tertiaires, de filières professionnelles tertiaires). Cette recherche s’appuie sur des travaux antérieurs qui portaient déjà sur l’enseignement de « questions socialement vives », au double sens où les références de ces enseignements donnent lieu à controverses dans les savoirs de références et à polémiques dans les pratiques de référence d’une part et que, d’autre part, elles font débats dans la société si bien que c’est un enjeu pour les sujets sociaux que sont les acteurs de l’éducation (et en premier lieu pour les élèves). L’enseignement de telles questions pose donc des problèmes spécifiques aux enseignants (Legardez, 2003 ; Simonneaux- Legardez, 2004).


Dans cette recherche, les principaux chantiers en sont les suivants :


> sur la "vivacité" dans les références scientifiques :
Nous avons vu que la question de la "mondialisation" apparaît très "controversée" dans les disciplines de références (sciences économiques, sciences de gestion, sociologie, sciences politiques, histoire, géographie …). Un double travail de veille bibliographique et de repérage des principales controverses est en cours.

> sur la "vivacité" dans les pratiques sociales de référence :
La question sociale de "la mondialisation" est également, pour de nombreux acteurs sociaux, une question très "disputée"; elle donne lieu à des polémiques et des conflits qui sont désormais très médiatisés. Un travail sur les médias est mené ; une veille et un repérage des principales disputes sont mis en place.

> sur la place de la mondialisation dans les savoirs scolaires institutionnels :
Un travail sur les programmes est en cours pour tous les niveaux et pour toutes les filières. Il montre que "la mondialisation" est déjà explicitement présente dans plusieurs programmes : pour l'Histoire-Géographie dans toutes les classes terminales et en Terminale également pour les Sciences Economiques et Sociales, alors qu'elle émerge dans les programmes de Terminale de la nouvelle filière de Sciences et Technologie de Gestion (ex Sciences et Technologies Tertiaires) et qu'elle est latente dans beaucoup d'autres : en Histoire-Géographie de l'Ecole primaire à la classe de Troisième au collège, ou encore dans les programmes du "pôle Economie-Droit" dans les filières professionnelles tertiaires. Enfin, la mondialisation peut donner lieu à des travaux menés par les élèves dans le cadre des nouveaux enseignements multidisciplinaires (comme l'Enseignement Civique Juridique et Social-ECJS) ou transversaux (comme les Travaux Personnels Encadrés-TPE, …)

> sur la place des manuels scolaires pour l'enseignement de la mondialisation :
L'analyse des tâches proposées dans les différents manuels est en cours. La place éminente des manuels dans le circuit de la production des savoirs scolaires et le rôle crucial des auteurs de manuels comme vecteurs et filtres des innovations dans l'enseignement sont souvent pointés. On peut faire l'hypothèse que les propositions d'enseignements issues des manuels auront des effets déterminants sur les pratiques d'enseignement, particulièrement sur des questions aussi vives que celles qui sont liées aux processus de mondialisation.

> sur la "vivacité" de la question dans les savoirs sociaux des acteurs de l'éducation :
Un questionnaire concernant les « savoirs préalables » sur la question de la mondialisation est proposé à des élèves de plusieurs niveaux et disciplines ainsi qu’à leurs enseignants. Des travaux précédents, - qui utilisent des outils issus de l'analyse des représentations sociales-, ainsi que des enquêtes préalables sur le thème de la mondialisation (Simonneaux, 2004), ont montré l'intérêt d'étudier le système des représentations-connaissances des élèves avant et après un enseignement scolaire et en relation avec les anticipations et les attentes de leurs enseignants. Ces questionnaires s'appuient encore sur des enquêtes menées par de nombreux organismes sur les représentations de la mondialisation ou de certains de ses aspects (Union Européenne, GEMDEV, …)

> sur les pratiques d'enseignement :
Un autre questionnaire est proposé aux enseignants et concerne leurs pratiques de l’enseignement de la mondialisation ; il est directement inspiré de la recherche menée récemment sur l'enseignement de la question "vive" des revenus (leur origine et leur répartition) (Legardez et al., 2002). Il concerne la perception de la vivacité de la question de la mondialisation pour l'enseignement et s'intéresse aux objectifs d'enseignement, aux références, aux outils et aux méthodes utilisées. Il s'agit bien de discours sur des pratiques, qu'il faudrait mettre en regard de réelles pratiques d'enseignement qui seront observées ultérieurement.

On peut penser qu’un enseignement portant sur des questions liées à la mondialisation se fixe comme objectif prioritaire de contribuer à la formation du jeune citoyen. On peut penser également qu'il gagnerait à s’appuyer sur une identification des différents cadres de référence (théories, concepts utilisés, acteurs concernés, caractéristiques retenues, conclusions, mesures à prendre …) et à mettre en évidence les controverses via un débat argumenté en classe.  Mais de telles pratiques seraient souvent en décalage avec les programmes, les directives ou les manuels ; elles seraient également en rupture avec les pratiques disciplinaires traditionnelles de plusieurs disciplines. Le « risque d’enseigner » est sans doute fort pour l’enseignant qui chercherait à mettre en débat dans la classe des questions aussi vives que celles de la mondialisation … pour ainsi mieux contribuer à une formation citoyenne et scientifique ! La recherche en cours devrait permettre d'éclairer sur les discours et les pratiques des acteurs du système éducatif à propos de l'enseignement de questions particulièrement vives puisque liées aux processus de mondialisation à l'œuvre ; "vives" dans les multiples références des enseignements et "vives" dans les savoirs sociaux que les élèves se sont construits sur ces questions, préalablement à un enseignement scolaire.



Bibliographie :

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BRAUDEL, F. Civilisation matérielle, économie et capitalisme XVe-XVIIIe siècle. Tome 2 : les jeux de l'échange. Paris: A. Colin, 1979
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Jean SIMONNEAU
ENFA, Toulouse, Laboratoire DQSE2
Alain LEGARDEZ
IUFM d'Aix-Marseille, UMR "ADEF" Université de Provence, INRP
Droits de reproduction et de diffusion réservés © LESTAMP - LCA 2005
Dépôt Légal Bibliothèque Nationale de France N°20050127-4889








 

 
     
 

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